La responsabilité précontractuelle pose la question de sa nature dès lors que, pour qu’un régime lui soit applicable, il faut la qualifier de contractuelle ou de délictuelle, étant celles-ci les seules deux branches de responsabilité reconnues par le droit français et le droit italien. Depuis son élaboration originaire en 1860 par Jhering, la responsabilité précontractuelle a connu un dénouement paradoxal : les auteurs qui se sont occupés de son aspect théorique ont fini par soutenir la thèse qui lui attribue la nature contractuelle, et pourtant, la jurisprudence, en Italie aussi bien qu’en France, l’a toujours qualifiée de délictuelle. Toutefois, grâce à la riche élaboration doctrinale italienne, la Corte di Cassazione, d’abord en 2011 et ensuite en 2016, a abandonné, quoique non définitivement, le précédent courant jurisprudentiel et l’a qualifiée de contractuelle. La responsabilité précontractuelle, en particulier, ne saurait pas être une simple species du genus de la responsabilité extracontractuelle, mais une responsabilité contractuelle en tant que responsabilité pour manquement à une obligation préexistante, notamment l’obligation de bonne foi précontractuelle qui régit la période des pourparlers et, ainsi, limite la liberté contractuelle afin d’assurer une protection à la confiance légitime engendrée chez les partenaires par l’instauration d’un contact « contractuellement orienté ». Nonobstant cette responsabilité ait connu un développement historique similaire dans les deux pays, l’apport de la doctrine italienne a été beaucoup plus considérable dans le débat que celui de la doctrine française, qui se limite à présenter la thèse contractuelle telle qu’elle avait été élaborée par Jhering, raison pour laquelle l’exposition de la thèse en revanche défendue en Italie présente son intérêt pour le droit français. Cela, tout particulièrement à la suite de la réforme du droit des contrats et des obligations de 2016, avec laquelle le législateur français a consacré à la responsabilité précontractuelle des textes au sein du Code civil ; la question se pose donc de savoir si, à la suite de ladite réforme, la jurisprudence française pourrait suivre la thèse contractuelle italienne ou si, à cause des différences toujours persistantes entre le droit italien et le droit français, la responsabilité précontractuelle est destinée à demeurer un type de responsabilité délictuelle. En essayant de répondre à cette question, des réflexions autour de la notion d’obligation s’imposent : puisque la responsabilité précontractuelle se place sur la frontière entre le contrat et la faute délictuelle, comme il est démontré par les différentes hypothèses y donnant lieu, il s’agit de retracer cette frontière sur la base de la distinction entre l’obligation, caractérisée non pas par son objet mais plutôt par sa structure, et le devoir (tel que le devoir de neminem laedere), afin de pouvoir la reconduire dans le domaine de la responsabilité (improprement dite) contractuelle et résoudre ainsi le débat. Dès lors, à partir de la prise en compte des hypothèses de responsabilité précontractuelle et les doutes qu’elles font naître quant à la nature de cette dernière, un nouveau critère de distinction entre les deux branches de responsabilité se dégage et pourrait être adopté par le législateur français en vue de la réforme du droit de la responsabilité civile, pour que ces doutes soient enfin dissipées et pour que la responsabilité précontractuelle soit reconduite dans le domaine qui lui appartient, c’est-à-dire celui du rapport obligatoire, et non pas dans celui du non-rapport, qui précède, en revanche, l’engagement de la responsabilité délictuelle.

"La nature de la responsabilité précontractuelle entre le droit français et le droit italien"

DEL NINNO, TOMMASO
2021/2022

Abstract

La responsabilité précontractuelle pose la question de sa nature dès lors que, pour qu’un régime lui soit applicable, il faut la qualifier de contractuelle ou de délictuelle, étant celles-ci les seules deux branches de responsabilité reconnues par le droit français et le droit italien. Depuis son élaboration originaire en 1860 par Jhering, la responsabilité précontractuelle a connu un dénouement paradoxal : les auteurs qui se sont occupés de son aspect théorique ont fini par soutenir la thèse qui lui attribue la nature contractuelle, et pourtant, la jurisprudence, en Italie aussi bien qu’en France, l’a toujours qualifiée de délictuelle. Toutefois, grâce à la riche élaboration doctrinale italienne, la Corte di Cassazione, d’abord en 2011 et ensuite en 2016, a abandonné, quoique non définitivement, le précédent courant jurisprudentiel et l’a qualifiée de contractuelle. La responsabilité précontractuelle, en particulier, ne saurait pas être une simple species du genus de la responsabilité extracontractuelle, mais une responsabilité contractuelle en tant que responsabilité pour manquement à une obligation préexistante, notamment l’obligation de bonne foi précontractuelle qui régit la période des pourparlers et, ainsi, limite la liberté contractuelle afin d’assurer une protection à la confiance légitime engendrée chez les partenaires par l’instauration d’un contact « contractuellement orienté ». Nonobstant cette responsabilité ait connu un développement historique similaire dans les deux pays, l’apport de la doctrine italienne a été beaucoup plus considérable dans le débat que celui de la doctrine française, qui se limite à présenter la thèse contractuelle telle qu’elle avait été élaborée par Jhering, raison pour laquelle l’exposition de la thèse en revanche défendue en Italie présente son intérêt pour le droit français. Cela, tout particulièrement à la suite de la réforme du droit des contrats et des obligations de 2016, avec laquelle le législateur français a consacré à la responsabilité précontractuelle des textes au sein du Code civil ; la question se pose donc de savoir si, à la suite de ladite réforme, la jurisprudence française pourrait suivre la thèse contractuelle italienne ou si, à cause des différences toujours persistantes entre le droit italien et le droit français, la responsabilité précontractuelle est destinée à demeurer un type de responsabilité délictuelle. En essayant de répondre à cette question, des réflexions autour de la notion d’obligation s’imposent : puisque la responsabilité précontractuelle se place sur la frontière entre le contrat et la faute délictuelle, comme il est démontré par les différentes hypothèses y donnant lieu, il s’agit de retracer cette frontière sur la base de la distinction entre l’obligation, caractérisée non pas par son objet mais plutôt par sa structure, et le devoir (tel que le devoir de neminem laedere), afin de pouvoir la reconduire dans le domaine de la responsabilité (improprement dite) contractuelle et résoudre ainsi le débat. Dès lors, à partir de la prise en compte des hypothèses de responsabilité précontractuelle et les doutes qu’elles font naître quant à la nature de cette dernière, un nouveau critère de distinction entre les deux branches de responsabilité se dégage et pourrait être adopté par le législateur français en vue de la réforme du droit de la responsabilité civile, pour que ces doutes soient enfin dissipées et pour que la responsabilité précontractuelle soit reconduite dans le domaine qui lui appartient, c’est-à-dire celui du rapport obligatoire, et non pas dans celui du non-rapport, qui précède, en revanche, l’engagement de la responsabilité délictuelle.
2021
"The nature of the pre-contractual liability in French and Italian law"
Responsabilité
Précontractuelle
Bonne foi
Pourparlers
Obligation
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